On connaît le Doisneau des villes, des rues et des cafés, et beaucoup moins le Doisneau des champs qui, lorsqu'il était employé à Billancourt et vivait dans la grisaille de Gentilly, se faisait rêver en lisant Giono.
Quelques années plus tard, cet amateur du Serpent d'étoiles est devenu photographe. A l'invitation d'un berger de la région de Lorgues, il accompagne en juin 1958 la montée des troupeaux de moutons vers les alpages dominant Draguignan, et il y retourne en octobre pour participer à la descente. Au long de ces deux trajets d'une dizaine de jours à pied (surtout lors du premier, car le second se termine par un accident), Doisneau accumule les images. Selon son biographe, Peter Hamilton, il aurait même formé le projet de consacrer un livre à la transhumance, et notamment travaillé sur la maquette d'un petit album pour enfants. Mais en définitive, Doisneau considéra que c'était "trop bête, au sens premier du terme" pour intéresser un éditeur. Il existe donc, dans les archives de Robert Doisneau, une ample documentation inédite sur la transhumance, et diverses ébauches de maquettes légendées de sa main. Nous en tirerons l'essentiel, que nous ferons très probablement précéder de la transcription d'une partie de ses entretiens avec Peter Hamilton, consacrée à cet épisode de sa vie, mais aussi, et plus largement, à sa relation au monde pastoral et paysan.
La transhumance de Robert Doisneau